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Par Christophe Bonvin /

Bouclement des comptes 2015 avec le NOUVEAU droit comptable


Depuis le 1er janvier 2013, les principes du nouveau droit comptable peuvent être appliqués par les entreprises de manière facultative. Cette révision en profondeur des règles comptables - l'ensemble du titre 32e du Code des Obligations a été remanié - doit être prise en compte de manière obligatoire dès le 1er janvier 2015. ll est donc primordial pour les entreprises de maîtriser ces nouveaux principes en vue du bouclement des comptes 2015 qui approche à grands pas.  

LES PRINCIPALES NOUVEAUTÉS  

Obligation de tenir une comptabilité et présentation des comptes  

Les critères liés à l'obligation de la tenue d'une comptabilité ne sont plus uniquement la forme juridique de l'entreprise, mais principalement la taille économique de cette dernière. Le nouveau droit comptable sépare désormais les entreprises en trois catégories bien distinctes:    

NIVEAU 1 (petites entreprises) : entreprises individuelles et sociétés de personnes avec un chiffre d'affaires annuel inférieur à 500'000 francs, associations et fondations qui n'ont pas l'obligation d'être inscrites au registre du commerce, fondations dispensées de désigner un organe de révision;   

NIVEAU 2 (entreprises ordinaires) : entreprises individuelles et sociétés de personnes avec un chiffre d'affaires annuel supérieur à 500'000 francs, personnes morales qui ne sont pas tenues de soumettre leurs comptes annuels au contrôle ordinaire;   

NIVEAU 3 (grandes entreprises) : personnes morales et fondations qui sont tenues de soumettre leurs comptes annuels au contrôle ordinaire selon l'art. 727 du CO, grandes associations.   

Selon les nouvelles règles du Code des Obligations, les petites entreprises peuvent se contenter de tenir une comptabilité des recettes et des dépenses ainsi que du patrimoine, appelée également comptabilité simple ou carnet du lait. Cette façon de présenter les comptes a été souhaitée par le législateur par mesure de simplification. Toutefois, bien qu'acceptée par le fisc, cette méthode n'apporte pas que des avantages. En cas de demande de crédit par exemple, il est probable que l'institut bancaire exige une comptabilité plus complète afin de prendre sa décision.

Quant aux entreprises ordinaires, elles ont l'obligation d'établir leurs comptes en comptabilité double et de présenter un rapport de gestion comprenant le bilan, le compte de résultat et l'annexe. A noter que les entreprises individuelles et les sociétés de personnes ne sont pas tenues d'établir une annexe. En ce qui concerne les grandes entreprises, ces dernières se voient désormais obligées, en plus du bilan, du compte de résultat et de l'annexe, de présenter un tableau de financement et un rapport annuel. De plus, l'annexe aux comptes devra comprendre des informations supplémentaires par rapport aux entreprises ordinaires: le montant des honoraires versés à l'organe de révision pour la révision et les autres prestations de services éventuelles, la ventilation des dettes à long terme portant intérêt selon leur exigibilité (de 1 à 5 ans et plus de 5 ans).   

Etats financiers selon une norme comptable reconnue  

Une des grandes nouveautés est l'obligation de tenir les comptes selon une norme comptable reconnue pour les sociétés dont les titres sont cotés en bourse (lorsque la bourse l'exige), les sociétés coopératives de plus de 2000 membres et les fondations soumises au contrôle ordinaire. Les sociétés qui établissent des comptes consolidés sont aussi soumises à cette règle. Cela signifie que les entreprises concernées devront désormais, en plus des comptes annuels fiscaux établis selon le Code des Obligations, présenter les comptes selon une norme comptable reconnue définie par le Conseil fédéral (Swiss GAAP RPC,  IFRS, US GAAP). Le nouveau droit comptable donne également le pouvoir aux propriétaires d'entreprises d'exiger la tenue des comptes selon une norme comptable reconnue. C'est le cas si des associés représentent ensemble au moins 20% du capital d'une société, 10% des membres pour une société coopérative ou 20% des membres pour une association. A noter que les états financiers dressés selon une norme reconnue sont présentés à l'organe suprême lors de l'approbation des comptes annuels fiscaux, mais ne nécessitent aucune approbation.    

Principes de présentation et d’évaluation des comptes annuels

Les grands principes comptables de l’ancien droit ont été adaptés ou précisés tandis que certaines nouveautés ont été introduites. Tour d’horizon des principaux changements.

Modifications au sujet de la présentation des comptes

Le rapport de gestion doit être établi dans les six mois qui suivent la fin de l'exercice. Le rapport de gestion doit être signé par le président de l'organe supérieur de direction ou d'administration et par la personne qui répond de l'établissement des comptes.

Le principe des valeurs de l'année précédente a été introduit : cela signifie qu'il devient obligatoire de présenter les valeurs de l'année N-l pour toutes les parties des comptes annuels.

Les comptes peuvent désormais être présentés dans la monnaie la plus importante au regard des activités de l'entreprise (par ex. EUR ou USD); il faut cependant indiquer les contre-valeurs en CHF et mentionner les cours de conversion utilisés dans l'annexe.

Les états financiers sont établis dans une langue nationale ou, c'est nouveau, en anglais.

En termes de présentation du bilan, les dettes portant intérêt doivent être séparées de celles ne portant pas intérêt, tandis que les actions propres doivent désormais être présentées en diminution des fonds propres.

Les réserves légales issues du capital (agio, prime) et les réserves légales issues du bénéfice (attribution obligatoire en cas de distribution de bénéfice) doivent être indiquées séparément.

Les créances et les dettes envers les actionnaires, envers les organes et envers les sociétés dans lesquelles l'entreprise détient une participation directe ou indirecte sont à présenter séparément dans le bilan ou dans l'annexe.

Le contenu devant figurer dans l'annexe aux comptes annuels a été étendu de manière générale, notamment concernant les principes comptables appliqués, les commentaires concernant certains postes du bilan et la déclaration attestant que la moyenne annuelle des emplois à plein temps n'est pas supérieure, selon les cas, à 10, 50 ou 250.

Modifications au sujet des principes d'évaluation

Si le chiffre d'affaires net ne dépasse pas 100'000 francs, il est possible de déroger au principe de la délimitation périodique (pas de transitoires).
Le principe de prudence, pilier du droit comptable suisse, n'a pas été modifié sur le fond: il est toujours possible de créer et dissoudre des réserves latentes selon les règles commerciales habituelles; de plus, l'article 960 e al. 4 du CO précise que les provisions qui ne se justifient plus ne doivent pas être obligatoirement dissoutes, ce qui signifie implicitement que des réserves latentes sont autorisées.   

Les actifs cotés en bourse ou ayant un prix courant observable sur un marché actif peuvent (mais ne doivent pas nécessairement) être évalués au cours du jour ou au prix courant, même si ce cours est supérieur au coût d'acquisition.

Les travaux en cours non facturés devront être évalués et valorisés de manière cohérente et pris en compte dans le chiffre d'affaires, ce qui aura un impact certain pour les entreprises qui ne tenaient pas compte de cette valorisation jusqu'à présent.

Les frais de fondation, d'organisation et d'augmentation de capital ne peuvent plus être activés et doivent donc être amortis immédiatement et totalement par l'intermédiaire du compte de résultat.

CONCLUSION

Par l'intermédiaire du nouveau droit comptable, le Conseil fédéral a souhaité introduire des allègements pour les petites entreprises, obliger les grandes entreprises à plus de détails et de transparence dans leurs états financiers et renforcer les droits des minorités.

Dans la pratique, la majorité des entreprises étant de taille ordinaire, c'est principalement au niveau de la présentation formelle des comptes 2015 que les grands changements auront lieu. Les entreprises de taille importante devront, elles, en plus, se conformer aux nouvelles exigences supplémentaires demandées par le Code des Obligations. Au niveau comptable, c'est le sujet de la valorisation des travaux en cours non facturés qui posera le plus de problèmes, car l'impact en termes de chiffre d'affaires supplémentaire pourrait être important dans certains domaines d'activité, notamment pour les professions libérales. Afin d'atténuer les conséquences fiscales de cette modification, rappelons que l'association Pro-Economy.vs a eu l'intelligence de négocier avec le Service cantonal des contributions valaisan afin d'obtenir la possibilité d'étaler la dissolution de ces réserves latentes sur trois exercices comptables par la constitution d'une provision.

En conclusion, nous conseillons à toutes les entreprises valaisannes d'anticiper ces nombreux changements qui interviendront inévitablement lors du bouclement des comptes 2015. En se préparant au bouclement 2015 dès maintenant, les impacts fiscaux du nouveau droit comptable pourront être limités ou compensés par des mesures d'optimisation fiscale appropriées.


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